Grain Loops est le premier disque que j'entends d'Austin Buckett. Je ne connaissais rien de ce compositeur australien, et d'après ce que j'ai vu, il semblerait qu'il s'agisse d'un artiste sonore qui a précédemment travaillé sur la perception du bruit blanc sous toutes ses formes à travers un programme radiophonique. Sur ce disque, Austin Buckett continue d'une certaine manière à travailler sur le bruit, mais également sur le rythme et la répétition, éléments fondamentaux de notre univers, en utilisant quatre caisses claires.
Pour Grain Loops, Austin Buckett propose un travail qui oscille entre certaines conventions et une grande part d'originalité. Austin Buckett n'utilise ici que des caisses claires, et pour ceux qui sont habitués aux musiques improvisées, ce n'est certainement pas une surprise de voir un batteur réduire son instrument à un seul de ses éléments. De plus, la caisse claire est ici frottée avec du papier, caressée, et rarement percutée comme souvent dans l'improvisation libre.
Et pourtant la musique de Buckett n'a rien à voir avec l'improvisation libre, elle est même plus proche du hip hop et de la techno que de la musique non-idiomatique. Contrairement à d'habitude, ce solo est très rythmé, mais rythmé d'une manière particulière. Car ici, le travail de mixage et d'édition est aussi important sinon plus que la "performance" elle-même. Pour Grain Loops, Austin Buckett se sert de très courts échantillons d'une ou plusieurs caisses claires qu'il met en boucle durant une minute pile. Il propose ainsi trente miniatures précises et chronométrées pulsées au rythme de l'échantillonnage. Et si les textures développées paraissent convenues d'une certaine manière, Austin Buckett crée tout de même des univers vraiment singuliers qui oscillent entre la musique électronique et la musique instrumentale ; il parvient à explorer une sorte de techno tribale sans kick ni basse avec des sources purement acoustiques et instrumentales.
Une démarche très intéressante en somme, avec un fort accent sur le rythme comme fondement de la musique et de l'univers, mais qui parvient surtout à créer une musique apparemment électronique avec de simples caisses claires.
AUSTIN BUCKETT - Grain Loops (LP/digital, Room40, 2014) : lien
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Chris Abrahams - Memory Night
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CHRIS ABRAHAMS - Memory Night (Room40, 2013) |
Memory Night n'a rien de l'improvisation expérimentale, qu'elle soit libre, non-idiomatique ou électroacoustique. Toutes les pièces sont clairement structurées et les idiomes sont utilisés avec abondance. Que ce soit un solo de piano modal, des scratch hip-hop, des boucles dub, des nappes proches de l'ambient et de l'abstract hip-hop, Chris Abrahams navigue sur des eaux connues oui, mais avec un navire très personnel. Il y a toujours des repères auxquels s'accrocher, des codes musicaux connus, mais le pianiste et compositeur les arrange d'une manière personnelle, au sein d'une ambiance plutôt sombre et intimiste. Carnets de bords d'un voyage nocturne au sein des goûts de ce musicien australien qui n'a pas fini de me surprendre.
Quatre compositions personnelles et singulières qui s'écoutent avec une certaine facilité, une facilité parfois déconcertante même. Chris Abrahams propose une sorte de musique qui pourrait ressembler à de l'idm lente, ou à du dub improvisé, ou encore à de l'eai mélodique et pulsé, à moins que ce ne soit rien de tout ça, juste une œuvre personnelle et singulière, intime et originale. En tout cas, même si l'aspect accrocheur et la propreté impersonnelle des nappes synthétiques me rebutent par moments, je reste admiratif devant la finesse avec laquelle séquences numériques et jeux instrumentaux s'équilibrent et se côtoient sans opposition, avec quel raffinement ils se mélangent sans s'imiter. Mais aussi devant la singularité de ces univers sonores improbables et inattendus.
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