Affichage des articles dont le libellé est -1000füssler. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est -1000füssler. Afficher tous les articles

1000füssler

GUNNAR LETTOW/GREGORY BÜTTNER - Flakes (1000füssler, 2014)
Gregory Bütnner continue sa série de publications au format mini-cdr (3") avec trois nouveaux disques. Le premier est un duo composé de Gregory Büttner lui-même (objets, ventilateur, haut parleur) & Gunnar Lettow (basse électrique, objets, field-recordings). Ce dernier utilise sa basse de manière plus électroacoustique que préparée, il place de nombreux objets dessus, joue avec les microcontacts, et place en plus des field-recordings qu'on a du mal à distinguer. Quant à Büttner, il met des objets en résonance grâce à un haut parleur basse en cône qui diffuse une fréquence sinusoïdale basse inaudible, haut parleur au sein duquel il met des objets, en plus d'autres objets mis en mouvement sur un ventilateur d'ordinateur. En gros, il s'agit de deux pièces de musiques électroacoustiques assez abstraites et très marquées par le bricolage, la réalité sonore des objets, et la physicalité du son. C'est court (18 minutes), et j'ai un peu de mal à évaluer la pertinence de ce projet. Ca me paraît très inventif, très créatif, Büttner & Lettow produisent des sons comme on en entend rarement, et j'imagine que les performance live doivent vraiment valoir le coup ; mais je n'arrive pas à savoir si ça tiendrait sur la longueur étant donné qu'ils ne semblent pas trop se soucier de la forme. On est proche de l'improvisation électroacoustique, mais complètement en-dehors des instruments : Büttner & Lettow fabrique du son pur, abstrait, et corrosif, et ça vaut le détour.

LUCIANO MAGGIORE - Onagro (1000füssler, 2014)
Six pièces provenant de field-recordings réalisés dans le sud de l'Italie, et 22 minutes d'une musique vraiment étrange. Avec Onagro, l'artiste sonore italien Luciano Maggiore propose encore une fois un disque comme on en aurait jamais imaginé. Si c'est bien fait à partir d'enregistrements de terrain travaillés ensuite sur un Revox, c'est vraiment difficile d'imaginer la source tellement le résultat semble abstrait. Maggiore nous convie ici à un voyage imaginaire au pays d'instruments inimaginables. On a l'impression d'entendre des percussions par moments, ou des clés de saxophone, puis des battons de pluie dans une chambre anéchoïque. Mais il s'agit d'une impression floue, on sait que ce n'est rien de tout ça, mais on ne sait pourtant pas à quoi à s'accrocher. Maggiore a composé ici six sketches sonores vraiment intrigants, très austères et abstraits, avec beaucoup d'espace, des textures qui interrogent, un volume faible, et surtout une imagination et une créativité qui sont propres à Luciano Maggiore. Très bon travail (encore une fois trop court peut-être).

AMPTEXT - Seeds of erasure (1000füssler, 2014)
Gary Rouzer est un musicien américain basé à Washington, qu'on trouve ici sous le pseudonyme de Amptext. Et pour ce mini-disque de vingt minutes tout rond, il nous propose deux belles pièces composées à partir d'objets, de cassettes, de field-recordings et de violoncelle. Sur Seeds of erasure, on commence par entendre les field-recordings, des enregistrements d'espace sonore comme ceux d'Anne Guthrie par exemple, des enregistrements de ventilateurs à air conditionné superposés. Et par-dessus ces belles bandes, Amptext agite et fait résonner divers objets (métalliques, motorisés, etc.) avant de jouer quelques notes de violoncelle enfantines sur la seconde piste. L'ambiance est aérienne, lumineuse, et espacée. Les éléments soniques présents sont simples, Amptext ne se précipite pas et propose deux pièces proches du drone dans la forme, mais plus créatives dans le contenu. Comme souvent sur ce label, on a affaire ici à un artiste qui a su accorder une large place au développement d'un langage personnel, et abstrait. C'est le première fois que j'entends ce musicien, et ça s'annonce plutôt bien. J'aime beaucoup cette superposition d'enregistrements abstraits et profonds, avec des objets incongrus et un instrument classique joué de manière tradtionnelle surtout. En soi, chaque élément n'est pas tellement neuf, mais leur superposition sensible et fine, par contre, l'est assurément. Conseillé.

utilisation instrumentale d'objets non-musicaux [adam asnan, olaf hochherz, gregory büttner, osvaldo coluccino]



Autant inspirées de la musique concrète, que des field-recordings, de l’art et des installations sonores, de la musique lo-fi ou de l’improvisation dite réductionniste, de nouvelles pratiques apparaissent chaque jour autour des objets. Objets fétiches, objets quotidiens, objets domestiques, objets traités par l’électronique, objets acoustiques. Si le répertoire instrumental et électroacoustique paraît s’essouffler, les pratiques musicales ne sont pas en reste, tout un univers sonore est encore à explorer avec ces nouvelles pratiques : je pense inévitablement à Ryu Hankil et sa machine à écrire, Atsuhiro Ito et ses néons, Gill Arnò (alias mpld) et ses rétroprojecteurs, Osvaldo Coluccino et Lali Barrière pour leurs objets quotidiens, etc.

ADAM ASNAN – FBFC (1000füssler, 2013)

Sur le label allemand 1000füssler dirigé par le musicien Gregory Büttner, une série de trois mini-Cd consacrée à ces pratiques vient justement de paraître. FBFC, par exemple, est une composition d’Adam Asnan centrée sur l’amplification du couvercle d’une pellicule 35mm – travail qui n’est pas forcément sans rappeler celui de mpld. Je n’avais encore jamais entendu ce musicien, mais un artiste prometteur s’annonce avec cette suite. Des battements réguliers semblables à des hélices d’hélicoptère, quelques larsens, des couleurs métalliques et industrielles, ainsi qu’une approche percussive ressortent clairement de l’ensemble de ces quatre pièces. Si aucun élément instrumental n’est mis en jeu ici, on croirait souvent entendre la peau d’une grosse caisse, et les formes utilisées sont souvent linéaires comme dans beaucoup de pièces réductionnistes. Adam Asnan, musicien issu de la musique concrète, exploite son couvercle comme un instrument, et explore ce matériau de manière plus musicale que bruitiste. Il s’agit de composer avec ce matériau issu du cinéma, pour en faire non un « cinéma pour l’oreille » mais bien une pièce musicale, qui s’apparente plus à de la musique instrumentale qu’autre chose. Très bon travail, j’attends d’en écouter d’autre avec impatience. 


OLAF HOCHHERZ – Rooms to carry books through (1000füssler, 2013)
Dans une veine similaire, Olaf Hochherz tente lui aussi de créer de la musique à partir d’une source sonore extérieure au domaine musical. Rooms to carry books through est une pièce de vingt minutes fondée sur une source sonore plus qu’incongrue, un livre, objet silencieux par excellence... C’est aguichant, étonnant et surprenant dans l’idée peut-être, mais à vrai dire, je ne suis pas sûr qu’une absence de sources sonores aurait changé grand-chose à cette pièce. Le livre est relié à tout un système de dix enceintes et de microphones piézoélectriques qui génèrent un larsen modifié par la pression exercé sur le livre. Il s’agit donc bien plus ici d’une exploration des champs piézoélectriques que des propriétés sonores d’un livre. En résulte une pièce très électrique et abrasive, improvisation granuleuse aux sonorités primitives et lo-fi. Ça grince, ça couine, ça pète, musique défectueuse et parasitaire, improvisation basée sur le bricolage et le bruit. Pas exceptionnel, mais j’aime plutôt bien ce côté simple et archaïque, ainsi que l’énergie avec laquelle l’instrument est utilisé.


GREGORY BÜTTNER – Scherenschnitt (1000füssler, 2013)


Le dernier disque de cette série est une pièce intitulée Scherenschnitt, extraite d’une installation sonore éponyme de Gregory Büttner. Une pièce très courte (dix minutes) basée en partie sur des objets (papiers, cartons, ciseaux et cutter) mais surtout sur une action (le découpage). Gregory Büttner a placé ses micros très très près des objets pour pénétrer au mieux le phénomène sonore. Une exploration sonore profonde du découpage, assez proche de la musique concrète. Car hormis quelques effets de delay, de réverbération, et d’amplification après la performance, le son est projeté tel quel. On reconnaît très bien les actions. Des découpages qui arrivent par assauts et par vagues. On peut percevoir la volonté de recherche assez minutieuse à travers le renouvellement constant des couleurs, Büttner ne lésine pas sur l’exploration et développe perpétuellement de nouveaux timbres avec de nouveaux matériaux toujours très proches. La construction est simple, une succession de vignettes sonores, mais du fait de la courte durée aussi, ce renouvellement perpétuel attise la curiosité et maintient l’attention. On a envie de connaître toutes les possibilités sonores de ce matériel et de cette action. Et on n’est vraiment pas déçu face à ce que propose Büttner au cours de ces dix minutes – format idéal pour un champ d’investigation si réduit. Conseillé.


OSVALDO COLUCCINO – Oltreorme (Another Timbre, 2013)


Je finis cet article sur les objets sonores avec Oltreorme, une suite de quatre pièces pour objets acoustiques d’un musicien italien qui avait déjà sorti un disque sur ce principe l’année dernière : Osvaldo Coluccino. Durant cinq mois, cet artiste a enregistré et composé quatre pièces acoustiques à partir d’objets frottés, frappés, caressés, percutés, etc. Aucun instrument n’est utilisé, mais l’approche de Coluccino est plutôt instrumentale, les sonorités tendent à se rapprocher des percussions le plus souvent, voire des cuivres sur la dernière partie. Sur les notes du disque, Osvaldo Coluccino recommande d’écouter ce disque à volume normal, voire bas, dans un environnement le plus silencieux possible. Effectivement, les sons ont tendance à être imperceptibles, ils passent comme des ombres fugitives qu’on peine souvent à percevoir. L’univers d’Oltreorme est instable, fantomatique et au-delà du réel. Même si ce sont des objets usuels et quotidiens qui sont utilisés tout du long, et de manière brute en plus, on n’arrive pas à se les représenter, pas plus qu’on ne parvient à se figurer la forme dans laquelle ils s’inscrivent. Une musique très ténue en somme, qui se fond dans l’environnement tout en s’en détachant, on ne sait plus si les sons proviennent des enceintes ou de l’environnement, la distinction est souvent imperceptible et le disque parvient même à se faire oublier par moments. Tout est affaire d’écoute, d’attention et de perception. Une expérience vraiment originale basée sur des textures uniques. Dans mon souvenir, je trouvais déjà le précédent disque de Coluccino assez inaccessible à cause de ces timbres trop abstraits et rudes, mais en fait, plus que difficile, Oltreorme est déroutant. A cause notamment de cette distinction qui s’efface entre l’univers musical abstrait et l’univers environnant concret. En plus de donner une vie musicale à des objets non-musicaux, Coluccino efface – de manière musicale - la distinction entre la projection sonore et son environnement, pratique radicale inspirée de la philosophie de Cage. Je ne suis pas sûr « d’aimer » ce disque, mais rien que pour l’aspect très déroutant et perturbant de l’expérience, je le conseille.

Informations, présentations, extraits, chroniques, interview

OLAF HOCHHERZ – Rooms to carry books through: http://www.1000fussler.com/seiten/reviews/reviews_olaf_hochherz.html
OSVALDO COLUCCINO – Oltreorme: http://anothertimbre.com/oltreorme.html