Osvaldo Coluccino - Atto (Another Timbre, 2012)
Alors là, voici une très étrange suite de pièces acoustiques, une suite initiatique à la recherche de l'essence sonore de la matière. Osvaldo Coluccino, compositeur et instrumentiste italien qui navigue entre l'écriture traditionnelle et les performances/installations sonores, nous propose ici quatre pièces où il n'utilise que des objets acoustiques et extra-musicaux, sans modifications électroniques/numériques. Matériellement, quelles sont les sources sonores? Aucune idée, elles me paraissent impossibles à identifier, on peut seulement saisir, à l'envolée, quelques bruits métalliques ou plastiques, quelques bois peut-être par moments. Les détournements d'objets réduisent la matière physique à un état d'insignifiance, seules les caractéristiques et les possibilités sonores de la matière semblent intéresser Coluccino pour cet étrange Atto. Des objets sont frottés, percutés, soufflés, crispés, malaxés, on ne sait pas vraiment comment ces textures sont produites, ni avec quoi. Mais on sait qu'il ne s'agit pas d'instruments, ce qui permet aussi à Coluccino d'éviter les clichés réductionnistes pour explorer de nouveaux territoires sonores et musicaux.
Si les espaces sonores dessinés par ces objets sont indéniablement originaux et créatifs, il n'en reste pas moins que leur contemplation demande une disponibilité d'esprit entière (ainsi qu'une bonne hi-fi...), car la musique de Coluccino est subtile, minimale, souvent très calme et aérée, mais aussi difficile, parfois austère ou hermétique. Il y a un côté très froid et chirurgical dans ces manipulations d'objets, et certains aspects tout comme certaines textures peuvent très vite rendre l'atmosphère stressante et oppressante. L'exploration des matériaux en tant que possibilités sonores et musicales est extrêmement profonde, si profonde qu'elle peut en devenir vertigineuse et effrayante. Atto réclame vraiment une attention et une disponibilité totales, si entières qu'il m'a paru trop austère ou hermétique. Cependant, la richesse des textures et la créativité de ce manipulateur d'objets pourront certainement envouter un certain nombre des lecteurs de ce blog à mon avis, et je pense tout de même que le voyage sonore proposé par Coluccino peut être assez puissant une fois que l'on se laisse prendre au jeu.
Informations, interview et extraits: http://www.anothertimbre.com/page132.html
Taus est le nom du duo Tim Blechmann/Klaus Filip, tous deux à l'ordinateur sur cette pièce enregistrée dans une église viennoise. Pour Pinna, Blechmann et Filip n'ont enregistré qu'une longue pièce de près de cinquante minutes, une pièce qui commence très calmement, par une nappe statique qui glisse longuement vers un territoire plus fort. Mais très lentement, car le duo Taus sait prendre le temps qu'il faut pour que les nappes emplissent l'espace et fusionnent parfaitement, il sait aussi prendre le temps nécessaire pour étirer le temps, le dilater autant que possible, afin que chaque micro-évènement prenne une importance considérable. Car si Pinna n'est pas un drone à proprement parler, il faut tout de même savoir que les évolutions qui constituent cette pièce sont très minimales, elle chemine à travers une pente au dénivelé incertain, une pente qui monte parfois, avant de redescendre sans même que l'on s'en rende compte. Les nappes envahissent l'espace avec langueur, assurance et déterminisme; les longs crescendos, les micros glissandos, les subtiles superpositions de couches sonores, tous ces éléments -perceptibles à condition d'être pleinement immergés dans cette pièce- augmentent sensiblement et tout aussi assurément la densité et l'intensité de cette nappe linéaire. Une nappe continue mais évolutive, qui se meut très lentement mais constamment, sans être vraiment statique. Ne connaissant pas trop ces deux musiciens, j'ai du mal à les distinguer, tandis que l'un joue le plus souvent sur des fréquences continues (souvent très hautes, proches du larsen), l'autre ponctue cet aplat sonore d'évènements bruitistes, comme des objets tombés ou frappés, si ce n'est le mouvement d'une chaise. Mais constamment, les deux musiciens semblent profondément connectés et l'écoute entre chacun est vraiment attentive.
Un voyage également profond dans des contrées numériques simples et calmes (faites de long drones bas, de sinusoïdes éthérées, et de grandes nappes étirées), Pinna, s'il réclame aussi une immersion totale, peut plonger l'auditeur dans des territoires riches, saisissants, et originaux pour leur lente évolution, pour ce rythme lisse et organique.
Informations, interview et extraits: http://www.anothertimbre.com/page131.html
Taus - Pinna (Another Timbre, 2012)
Taus est le nom du duo Tim Blechmann/Klaus Filip, tous deux à l'ordinateur sur cette pièce enregistrée dans une église viennoise. Pour Pinna, Blechmann et Filip n'ont enregistré qu'une longue pièce de près de cinquante minutes, une pièce qui commence très calmement, par une nappe statique qui glisse longuement vers un territoire plus fort. Mais très lentement, car le duo Taus sait prendre le temps qu'il faut pour que les nappes emplissent l'espace et fusionnent parfaitement, il sait aussi prendre le temps nécessaire pour étirer le temps, le dilater autant que possible, afin que chaque micro-évènement prenne une importance considérable. Car si Pinna n'est pas un drone à proprement parler, il faut tout de même savoir que les évolutions qui constituent cette pièce sont très minimales, elle chemine à travers une pente au dénivelé incertain, une pente qui monte parfois, avant de redescendre sans même que l'on s'en rende compte. Les nappes envahissent l'espace avec langueur, assurance et déterminisme; les longs crescendos, les micros glissandos, les subtiles superpositions de couches sonores, tous ces éléments -perceptibles à condition d'être pleinement immergés dans cette pièce- augmentent sensiblement et tout aussi assurément la densité et l'intensité de cette nappe linéaire. Une nappe continue mais évolutive, qui se meut très lentement mais constamment, sans être vraiment statique. Ne connaissant pas trop ces deux musiciens, j'ai du mal à les distinguer, tandis que l'un joue le plus souvent sur des fréquences continues (souvent très hautes, proches du larsen), l'autre ponctue cet aplat sonore d'évènements bruitistes, comme des objets tombés ou frappés, si ce n'est le mouvement d'une chaise. Mais constamment, les deux musiciens semblent profondément connectés et l'écoute entre chacun est vraiment attentive.
Un voyage également profond dans des contrées numériques simples et calmes (faites de long drones bas, de sinusoïdes éthérées, et de grandes nappes étirées), Pinna, s'il réclame aussi une immersion totale, peut plonger l'auditeur dans des territoires riches, saisissants, et originaux pour leur lente évolution, pour ce rythme lisse et organique.
Informations, interview et extraits: http://www.anothertimbre.com/page131.html