unframed recordings and other multiples I

Richard Garet/Brendan Murray - Of Distance (Unframed, 2009)

Garet et Murray ont improvisé différentes pièces qui ont par la suite servi de matériaux sonores à Of Distance, un album réédité aujourd'hui sur le label Unframed. Dans une approche drone et musique ambient, le duo utilise des manipulations digitales, des procédés informatiques et quelques instruments analogiques semble-t-il. Des bourdons se superposent à des field-recordings mis en boucle, de longues nappes et des textures étranges autant que sombres se succèdent. Il n'y a rien de vraiment nouveau et autant dire que j'ai eu du mal à pénétrer cet univers micro-structural et linéaire. Les deux longues pièces qui forment Of Distance sont lisses, dans les deux sens du terme, c'est-à-dire sans pulsation ni relief, seules les textures changent progressivement de couleur tandis que l'intensité reste la plupart du temps assez constante. Il y a de nombreux changements, des mouvements impénétrables qui peuvent malencontreusement paraître inconséquents. Même si les textures produites sont plutôt réussies, je n'ai pas réussi à m'imprégner de la structure narrative que prennent ces pièces, pas moyen de trouver un point d'accroche dans ces mouvements sonores beaux aux premiers abords, mais comme dénués de sens. C'est vraiment dommage de s'arrêter sur cette structure et cette progression/évolution qui manquent d'un aspect envoûtant et absorbant, car la couleur des différentes nappes est souvent réjouissante (même si elle manque parfois de nouveauté) et toujours très bien travaillée. Ceci-dit, la deuxième pièce prend plus de reliefs, il y a quelques ruptures qui viennent rompre la continuité des nappes, et la palette s'élargit considérablement, la gamme des couleurs tout autant que les variations d'intensités, cet élargissement et cette ouverture font de "The tyranny of the objects" une pièce plus captivante et intéressante, en tout cas moins soporifique que "In parallel". En gros, je suis plus que partagé, et j'attends d'en entendre plus de ces deux compositeurs...


Gill Arnò - Nervatura (Unframed, 2008)

Publié en 2008 sur le label de Gill Arnò lui-même, Nervatura a été édité à ce moment à seulement dix exemplaires dans des pochettes faites à la main. Aujourd'hui réédité dans la reproduction d'une des pochettes, on peut à nouveau écouter cette suite du proche collaborateur de Ben Owen. Si l'on commence déjà à percevoir faiblement des drones qui feront bientôt la spécificité de Gill Arnò (alias mpld), c'est-à-dire à partir de rétroprojecteurs préparés, ces trois pièces sont surtout axées sur des field-recordings. Constructions phonographiques et assemblements de différents préenregistrements, citadins par moments, contemplatifs et urbains, post-industriels à d'autres, ou à l'intérieur d'espaces intérieurs aux acoustiques ouvertes et particulières comme des halls, ces trois pièces plutôt ambient produisent un univers étrange et sensible où les sons valent pour eux-mêmes, où ils perdent leur référent au profit d'une texture étrange et méditative (même si les coordonnés géographiques des enregistrements sont indiqués...). Cependant, encore une fois, je n'ai pas vraiment réussi à pénétrer ce territoire mystérieux mais chancelant, et j'ai du mal à parler de musiques qui ne m'évoquent rien, et ne me font ressentir que peu de choses. Une musique à méditer, au casque, qui demande beaucoup de disponibilité mais qui n'a pas su retenir mon attention malgré la sensibilité des traitements et des constructions sonores. Mais je pense qu'elle peut amplement convenir aux amateurs de field-recordings. 

Aki Onda - Diary (Unframed, 2011)

Depuis maintenant une vingtaine d'années, Aki Onda compose un journal de bords à partir de fragments sonores capturés sur des cassettes lors de tous ses voyages. Régulièrement, ces cassettes servent de bases aux concerts de l'artiste japonais, cassettes qu'il rejoue hors de leur contexte et qu'il modifie en temps réel. Certainement impressionné par ce rapport étrange au son et à l'enregistrement, Gill Arnò a décidé de publier ce journal dans la mesure du possible. Il s'agit donc d'un recueil de photos où est représentée une quarantaine de cassettes de la collection d'Aki Onda, d'un essai de quelques pages sur son lien à ce support depuis l'achat de son premier baladeur cassette en 1988, et d'une cassette d'une heure avec un enregistrement sur chaque face. Une publication assez fétichiste en somme... La première face a été enregistré de jour sur la plage de Celestún au sud du Mexique: un enregistrement bruyant où les vagues se mêlent à un souffle constant dans un chaos sonore au spectre excessivement large pour former une nappe extrêmement dense, tellement dense qu'on en oublie parfois la source. La deuxième face est un enregistrement dédié à Marguerite Duras, capturé de nuit cette fois sur la plage de Trouville, au nord de la France, où la dédicataire a résidé. La marée est cette fois beaucoup plus aérée, on peut aisément distinguer le mouvement des vagues auquel s'ajoutent des grillons et autres insectes nocturnes. Deux faces imperturbables où la moindre anomalie paraît aberrante (que ce soit une mouette ou un moteur), mais surtout deux faces qui me laissent de marbre malgré le soin apporté à bien distinguer les différences qui surviennent selon les micros et les environnements sonores même s'ils peuvent a priori paraître indiscernables, telle la différence sonore entre deux plages.