Costis Drygianakis - Diadromi (More Mars, 2012)

Peu connu à l'étranger, Costis Drygianakis est l'un des acteurs les plus importants de l'avant-garde grecque depuis le milieu des années 80 environ, notamment dans les domaines de la "musique optique" , de la musique électroacoustique et du collage sonore. Pour cette nouvelle publication, Drygianakis se base sur une installation sonore éponyme de Manolis Yannadakis qui a pris place en 2000 à Thessaloniki. Il s'agissait d'un long couloir où quatorze pièces musicales accompagnaient chacune une diapositive. Quatorze boucles d'environ deux minutes que le public entendait indépendamment les unes des autres dès qu'il se plaçait face à une diapositive.

C'est environ dix ans plus tard que l'artiste sonore Drygianakis décide d'assembler et de recoller les morceaux (mais je ne sais pas s'il s'agit de boucles récupérées de l'installation ou s'il sen 'inspire seulement) pour une autre pièce musicale, destinée cette fois à une large diffusion plus qu'à une installation/performance qui réclame une structure d’accueil particulière. Ainsi renaît Diadromi (mot qui signifie "itinéraire"), sous une autre forme...

Sur le mini-CD publié par le label more mars, on retrouve l'idée de tableaux sonores diffusés en boucle, Drygianakis colle avec précision et minutie des matériaux hétérogènes, très hétérogènes même... Des sons instrumentaux, électroniques, bruitistes, créés par lui-même ou un de ses multiples collaborateurs, des spots publicitaires, des extraits de discours, des samples de musique traditionnelle, de Bach, Wagner, etc. La palette est extrêmement riche, les tableaux très variés et hétéroclites, et facilement, on s'étonne autant qu'on admire l'agilité et la dextérité avec lesquelles Costis Drygianakis a su composer cette fresque sonore.

Diadromi est une pièce itinérante et circulaire sans fin ni début (ce qui pourrait, malgré son aspect franchement expérimental et avant-gardiste, l’apparenter à une nouvelle forme de musique rituelle), une pièce réellement destinée à être écoutée en boucle (ce que la courte durée de vingt minutes facilite), qui se termine sur la même note de violon que celle qui l'ouvre. Une construction sonore linéaire mais non-narratives où les tableaux s'enchaînent tout en se superposant, où une mélodie de jazz soutient un journaliste, où les bruits les plus étonnants se juxtaposent à des mélodies fantomatiques.

Une pièce pleine de mystères sonores et visuels qui se révèlent au fil des écoutes et au gré de l'imaginaire, exceptionnellement riche de couleurs, de textures, des juxtapositions osées, et surtout, d'ambiances hétéroclites toujours surprenantes et inattendues. Recommandé!