JASON LESCALLEET - Much To My Demise (Kye, 2014) |
Lescalleet veut avec ce vinyle explorer la déliquescence et la "qualité temporelle" du support analogique. C'est pourquoi il a inséré cette requête particulière. Une requête qui correspond également très bien au processus de création des trois pièces présentées ici. Trois mois ont été nécessaires. Trois mois au cours desquels Lescalleet a enterré des bandes préenregistrées. Aucun geste, aucune transformation, aucun "processus musical", juste la marque du temps (et de la terre) sur des bandes magnétiques. Lescalleet présente un enregistrement d'un solo de piano lent et romantique à peine perceptible, au bord de l'anéantissement, ainsi qu'un enregistrement de larsens déjà plus fort et présent. Des enregistrement très différents, mais qui s'écoutent de la même manière. C'est à dire pas pour eux-mêmes. En effet, le plus intéressant dans ces bandes, c'est avant tout l'action du temps et de la dégradation naturelle.
Il ne s'agit pas de musique à proprement parler, mais d'art au sens le plus noble. Pour Much To My Demise, Lescalleet ne tien pas forcément à créer une (ou trois) pièce musicale, mais il tente bien plutôt de saisir l'action du temps, d'informer des processus vitaux, de contempler la nature dans son ensemble. Il s'agit d'une oeuvre ambitieuse, qui retrace les efforts particuliers d'un artiste sonore qui tente par son médium de capter et de figurer la vie (son mouvement, son action, sa temporalité) de manière sonore et matérielle. Un album concept passionnant, car les trois pièces présentées ont en plus le mérite d'être aussi riches et denses que le processus de création. Hautement recommandé.