Martine Altenburger, Frédéric Blondy, Bertrand Gauguet - Vers l'île paresseuse (Creative Sources, 2011)

Vers l'île paresseuse réunit trois musiciens aux origines et aux instruments variés: Martine Altenburger au violoncelle, Frédéric Blondy au piano et Bertrand Gauguet aux saxophones alto et soprano. Pour ces cinq improvisations publiées par Creative Sources, le trio s'efforce de déployer des interactions subtiles et délicates, de créer des espaces sonores variés, collectifs et poétiques.

Tout commence par une imbrication de strates qui s'intensifient plusieurs fois avant de brutalement s'interrompre. La tension monte à chaque fois, mais n'atteint véritablement son paroxysme que dans l'éclatement et la dispersion. L'énergie maximale est en effet atteinte lorsque les interventions se font très courtes, pointillistes même, et plutôt agressives. A partir de cette pièce, "La montagne ne porte pas les nuages", le ton est donné pour le reste de l'album: de longues nappes sombres et languissantes, de très courtes cellules à partir de techniques étendues parfois agressives, des sons stridents ou obscurs, harmoniques, percussifs, ou bruitistes, tout ceci se mélange, se succède, s'imbrique ou s'oppose selon de multiples configurations. Passé l'effet de surprise de la sonorité générale et particulière de cet orchestre de chambre, on trouve vite nos repères et il ne reste plus qu'à se laisser emporter à travers des paysages variés en compagnie de nos trois musiciens aussi inspirés qu'attentionnés. car l'écoute semble extrêmement intense, si intense qu'à chaque paysage composé, un seul désir smeble être à son origine.

Cinq esquisses naturalistes qui peignent à chaque fois un paysage nouveau et précis: qu'il soit sombre et serré; clair, ouvert et espacé; contrasté ou homogène; la convergence des intentions appuie la clarté et la précision de chaque couleur ou caractère désiré. La grande diversité des configurations et des structures permet une multiplicité des modes de jeu et de composition: bourdon, écriture cyclique ou cellulaire, jeu rythmique, textural ou timbral, etc. cette multiplicité déploie à son tour des couleurs et des reliefs variés, précis et originaux. Le voyage Vers l'île paresseuse, paradoxalement onirique (par sa nouveauté) et naturaliste (par sa précision et sa clarté), nous entraîne sur des territoires beaux, délicats et poétiques, parfois sombres ou languissants, mais en tout cas toujours intenses, riches, profonds et neufs.

Tracklist: 01-La montagne ne porte pas les nuages / 02-Dans les plis du vent / 03-Vers l'île paresseuse / 04-Hypnotisé sur une arête / 05-Enclave nocturne et transitoire