Jamie Drouin & Sabine Vogel - Raumfluchten (Infrequency, 2012)
Raumfluchten est une piste de trente minutes divisée en sept sections et interprétée par le duo Jamie Drouin (synthétiseur analogique, radio) et Sabine Vogel (flûte, cailloux). Sept tableaux plutôt calmes, aux sonorités et aux atmosphères à chaque fois surprenantes. Fréquences radios, bruits de clés, cailloux frottés et frappés, électricité dérangée, souffles humains et électriques, clapotis, fréquences analogiques saturées et calmes, quelques sons épars s'entremêlent avec grâce au profit d'une atmosphère souvent sereine ou même contemplative. Une contemplation du son et de l'interaction parfaite entre deux musiciens inventifs et réceptifs au discours de chacun. Un discours toujours adapté à l'autre mais de manière intransigeante et sans compromis.
Cette suite de trente minutes propose des tableaux aux atmosphères pleines de contrastes, à l'image de cette étrange pochette ornée d'un clair-obscur surexposé. Des tableaux d'ombres et de lumières, de synthèses analogiques et de bruits acoustiques, de silence et de bruit. Le but de ces sept improvisations est de surprendre l'auditeur, et autant dire que le pari est réussi, car pour ma part, je n'avais encore jamais entendu rien de semblable: une musique principalement composée d'éléments abstraits qui, se superposant, finissent par former des figures concrètes, narratives ou expressives. Entre abstraction et figuration, entre lumière et obscurité, entre bruit et musique, entre silence et son, la situation des musiciens paraît intermédiaire mais la musique est tout de même sans compromis, et l'expressionnisme du duo est aussi puissant que sa capacité d'écoute, d'interaction, et surtout, d'inventivité. Une suite peut-être courte mais riche et dense, aux atmosphères très travaillées, pour une suite d'esquisses qui se mettent en valeur les unes à la suite des autres. Tableaux calmes, poétiques et sensibles, lumineux à certains moments, obscurs à d'autres, mais toujours précis et absorbant.
Une immersion profonde et dense dans des bruits obscurs et des notes lumineuses. Très bon.
Autre immersion profonde dans le son, Holes/Tracts est une suite de quatre pièces interprétée par le duo Coppice, nom de scène pour Noé Cuéllar et Joseph Kramer. Des pièces étranges et uniques, composées à partir de shruti box, de filtres acoustiques, et de boucles magnétiques. On peut s'en douter, il s'agit là de pièces principalement axées sur le timbre et l'exploration sonique d'instruments/objets acoustiques. Clapotements, grincements, frottements, le son est noyé, répercuté, amplifié, on ne sait jamais trop comment ni avec quoi. Et c'est sans compter sur les silences et les nombreux passages très faibles et calmes où les repères deviennent encore plus évanescents, flous, obscurs.
Un album dur d'écoute, hors de toute esthétique et qui semble extérieur à toute norme et à tout langage musical. Holes/Tracts immerge l'auditeur dans des profondeurs soniques acoustiques abstraites et non-musicales souvent, mais tout de même poétiques et envoutantes. Car Coppice semble raconter une histoire, un fil narratif semble conduire ces quatre pièces, mais il s'agit bien évidemment d'une histoire purement sonore, où les rebondissements se font par modulations d'intensité, par évolution de textures. Coppice nous narre une histoire peut-être irrationnelle, en tout cas extérieure aux codes esthétiques préétablis, mais une histoire qui vaut le coup pour sa singularité, pour l'originalité du langage qu'elle met en place, mais également pour sa structure souvent surprenante. Une musique extraterrestre, qui ne semble pas produite sur la même planète, qui semble surgir d'une nouvelle espèce, une espèce dotée d'une perception extrêmement aiguisée, sensible et poétique du son.
Coppice - Holes/Tracts (Consumer Waste, 2012)
Autre immersion profonde dans le son, Holes/Tracts est une suite de quatre pièces interprétée par le duo Coppice, nom de scène pour Noé Cuéllar et Joseph Kramer. Des pièces étranges et uniques, composées à partir de shruti box, de filtres acoustiques, et de boucles magnétiques. On peut s'en douter, il s'agit là de pièces principalement axées sur le timbre et l'exploration sonique d'instruments/objets acoustiques. Clapotements, grincements, frottements, le son est noyé, répercuté, amplifié, on ne sait jamais trop comment ni avec quoi. Et c'est sans compter sur les silences et les nombreux passages très faibles et calmes où les repères deviennent encore plus évanescents, flous, obscurs.
Un album dur d'écoute, hors de toute esthétique et qui semble extérieur à toute norme et à tout langage musical. Holes/Tracts immerge l'auditeur dans des profondeurs soniques acoustiques abstraites et non-musicales souvent, mais tout de même poétiques et envoutantes. Car Coppice semble raconter une histoire, un fil narratif semble conduire ces quatre pièces, mais il s'agit bien évidemment d'une histoire purement sonore, où les rebondissements se font par modulations d'intensité, par évolution de textures. Coppice nous narre une histoire peut-être irrationnelle, en tout cas extérieure aux codes esthétiques préétablis, mais une histoire qui vaut le coup pour sa singularité, pour l'originalité du langage qu'elle met en place, mais également pour sa structure souvent surprenante. Une musique extraterrestre, qui ne semble pas produite sur la même planète, qui semble surgir d'une nouvelle espèce, une espèce dotée d'une perception extrêmement aiguisée, sensible et poétique du son.
Cremaster - live at audiograft (consumer waste, 2012)
Ce live at audiograft est le troisième disque en date du duo Cremaster, un duo composé de deux musiciens bien connus par les lecteurs de ce blog, Alfredo Costa Monteiro (dispositifs électroacoustiques) et Ferran Fages (dispositifs électroacoustiques, larsens et table de mixage). Un duo qui aime les parasites électriques, les sons corrosifs ou abrasifs, les larsens incessants, et autres textures bruitistes et abstraites. Pour ce court enregistrement live de 26 minutes, les deux plasticiens sonores nous délivrent une palette de sons hétéroclites qui s'embrassent et s'entremêlent constamment, boucles analogiques, court-circuits, et larsens forment des textures qui s'agencent avec sensibilité dans une construction improbable de sonorités électriques.
Une unique pièce plutôt courte en effet, mais qui n'en est pas moins intense et riche. Les textures sont riches, originales, les variations d'intensités nombreuses. A leur manière, Cremaster explore le son également et construit un environnement musical principalement axé sur le timbre et l'exploration sonique électroacoustique cette fois. L'art de sculpter des informations électriques avec une perception musicale du courant et du son, l'art de peindre de magnifiques tableaux avec ce que l'on considère comme des parasites sonores comme le souffle ou le larsen. Une musique surprenante, jouissive, riche, où les textures sont agencées avec précision dans une attention constante à chaque intervention de l'un comme de l'autre membre du duo.
En un peu plus de vingt-cinq minutes, FF et ACM nous délivrent une pièce riche de couleurs et très intense, construite et structurée de manière à immerger l'auditeur de manière intensive. Une plongée immersive dans des courants électroacoustiques abrasifs et parasitaires, mais aussi sensiblement musicaux et savamment structurés. Un enregistrement qui ne cesse de surprendre pour ces couleurs sonores organiques et physiques, ingénieusement et hautement créatif et inventif. Recommandé.