On reconnaît le design, il s'agit encore d'une publication Peira. Trio acoustique avec Jeff Kimmel à la clarinette basse, David Moré à la scie musicale et Jacob Wick à la trompette, Tilting embrasse avec humour et allégresse l'improvisation libre. Durant une trentaine de minutes, le trio Kimmel, Moré, Wick compose huit courtes pièces énergiques et aventureuses. Souffles, cris virulents, bruits véhéments, questions interrompues, ruptures, tout ceci se croise et s'enchevêtre comme dans un jeu de légo surréaliste. Un jeu interactif ultra-dynamique, qui superpose des discours denses et intenses très à l'écoute l'un de lautre, tout en sachant ménager des pauses en-dehors des fractures qui cassent les différentes énergies. Tilting n'est pas seulement une démonstration de virtuosité et une négation de la musique, malgré l'omniprésence de techniques étendues, l'absence de pulsations, de rythmes et de mélodies, ce trio acoustique sait aussi ménager l'auditeur avec de nombreuses touches d'humour, telles ces phrases aux intonations de questions à la trompette, ces sonorités primitives, et ces ruptures constantes qui semblent toujours poser une distance vis-à-vis de l'intervention fracturée. Des improvisations comme décalées, légères, mais tout de même puissantes et intenses, car ce qui se passe entre chaque musicien étonne, la cohérence et la cohésion du trio est telle qu'on ne sait pas souvent qui fait quoi malgré la diversité des instruments. Un son collectif définitivement attentif à chaque membre et à ses possibilités instrumentales autant qu'à ses potentialités. On regrettera seulement la trop courte durée de ces pièces qui ne permet pas de pleinement se projeter à l'intérieur de ces univers pourtant aventureux, ainsi que cette balance constante entre un discours proche de l'hystérie où les réponses fusent à une vitesse furieuse et insaisissable, et un paysage plat et étendu, où les souffles et les frottements ne forment que peu de relief. Cette alternance entre ces deux ambiances paraît un peu facile et déjà entendue, et on se lasse assez vite de ces résolutions dans une atmosphère bruitiste, espacée et méditative. Ceci-dit, Tilting vaut tout de même le coup d'oreille pour son énergie surprenante et son humour décalé, mais aussi pour la virtuosité de Jacob Wick, formidable trompettiste qui parvient à déployer les différentes possibilités de ce cuivre selon les dynamiques et les énergies recherchées et construites. Un album tout de même plein de spontanéité, d'énergie véhémente, de talent instrumental et de créativité sonore. A écouter par curiosité.
Tracklist: 1-Horns Rev II / 2-Thanet / 3-Dabancheng / 4-Alpha Ventus / 5-Gansu / 6-Nysted / 7-Alta / 8-Burbo