Martin Küchen - The Lie & The Orphanage


MARTIN KÜCHEN - The Lie & The Orphanage (Mathka, 2010)

Martin Küchen: alto, tenor & baritone saxophones, pocket radio

01- Named By An Unnamed Source
02- The Testimony Of Marie Neumann (For Alfred-Maurice De Zayas)
03- Warszawa
04- The Orphanage
05- Plausible Lies
06- Other Losses (For James Bacque)
07- An Eye For An Eye / Congolese Women (For John Sack)
08- Killing The Houses, Killing The Trees (Multitracked Version)

Troisième enregistrement solo de l'hyperactif et éclectique suédois Martin Küchen, The Lie & The Orphanage, paru sur le label polonais Mathka, se situe dans la même lignée que les précédents. Un disque encore et toujours aux frontières de l'expérimentation et des résurgences ancestrales.

Car si Küchen utilise uniquement des techniques étendues, sa musique n'a rien à voir avec celle de ses homologues saxophonistes qui poussent l'exploration de l'instrument à ses extrêmes. Les techniques de Küchen servent une musique immémoriale, basée sur le souffle et la percussion. Concrètement, cela donne bien sûr une amplification des clés et des tampons, un souffle accentué et omniprésent: mais le but de Küchen n'est pas d'explorer l'instrument, cette exploration est mise au service d'un contenu beaucoup moins austère que les recherches froides menées sur le timbre auxquelles nous sommes habitués. Ici, le rythme est au premier plan, chaque composition se trame sur une pulsation primordiale, une pulsation sur laquelle peut se déployer la musique, dont l'absence serait dévastatrice. C'est ensuite un souffle qui surplombe cette pulsation, parfois une mélodie aux sonorités proches de la flûte, parfois un simple son modifié par les clés, ou encore les clés seules, etc., les possibilités sont infinies. Küchen nous plonge dans une musique immémoriale, ancestrale, qui appartient aujourd'hui à l'inconscient collectif. L'approche est organique, des idées simples se déploient non sans nous affecter profondément, car les compositions mises au point par ce jeune prodige sont extrêmement émotionnelles, elles sont mêmes brulantes de sentiments: la haine du mensonge, la tristesse de l'orphelinat peut-être, la mélancolie, mais aussi et surtout la joie et l'énergie propres aux rites et aux cérémonies, l'espoir fondé par la magie de la musique.

The Lie & The Orphanage regroupe huit pièces assez courtes, chacune possède son propre caractère, et toutes nous affectent différemment, Küchen nous guide dans des territoires musicaux et sentimentaux uniques (parce qu'inconscients?), mais qui sont néanmoins tous ancrés dans un paysage empreint d'humanité et de ritualisme. Des compositions organiques, puissantes, riches (derrière l'apparente monotonie de la pulsation se cache parfois des compositions rythmiques étonnantes), et toujours créatives. Magnifique!