Michael Thieke & Olivier Toulemonde / Lucio Capece & Jamie Drouin

The Berlin series no.1 (Another Timbre, 2013)
Pour ce premier split d'une série consacrée à la scène musicale berlinoise, le label another timbre propose deux longues pièces improvisées de deux duos différents: Inframince par Michael Thieke & Olivier Toulemonde, suivi de Immensity par Jamie Drouin & Lucio Capece.

Inframince est la plus longue des deux propositions, du haut de ses 45 minutes presque. Une longue improvisation continue où se succèdent des plages sonores composées à partir d'objets acoustiques frappés ou frottés sur une table par Olivier Toulemonde, et accompagnées par la clarinette de Michael Thieke qui joue également avec l'étirement du temps, des sons continus, ainsi qu'avec de nombreuses techniques étendues. Une grande plage abstraite où se succèdent des bruits hétéroclites et surprenants, dans un dialogue qui se fait dans la continuité, de manière intime et réactive, un dialogue entre l'abstraction froide des objets (en plastique, métal, verre, etc.) et la chaleur de la clarinette. Il y a de très beaux moments, surtout lorsque les rôles s'inversent et que les objets deviennent chaleureux par rapport à l'abstraction des techniques étendues à la clarinette, lorsque les objets deviennent plus présents, intenses et riches. Mais c'est malheureusement un peu long, et j'ai un peu de mal à rester attentif durant plus de quarante minutes. Une pièce qui manque de continuité ou de rupture, je ne sais pas, mais qui a parfois du mal à retenir l'attention malgré des passages superbes. Après, pour ce qui est des seules interventions d'Olivier Toulemonde, je conseillerais quand même cette pièce où il fait preuve d'énormément de créativité.

Le second duo est un peu plus particulier, et prend de l'intérêt surtout au vu du contexte. Car Jamie Drouin est un musicien qui pratique avec des musiciens sur de longues durées, et ce duo est un enregistrement de sa première rencontre avec Lucio Capece (clarinette basse et objets). De plus, Drouin commençait tout juste lors de cet enregistrement à explorer le synthétiseur modulaire Serge qu'il utilise ici avec une radio. Tout ceci pour dire que même si Immensity est principalement constitué de longs sons continus souvent statiques et d'interventions minimalistes, on ressent en même temps une certaine fragilité et parfois même un manque d'assurance durant cette trentaine de minutes. Le dialogue est très serré entre les musiciens, il y a souvent des jeux d'imitations et de questions-réponses, un dialogue serré comme pour se rassurer. Mais en même temps, cette fragilité produit une certaine tension, et permet de dépasser l'improvisation électroacoustique statique telle qu'on l'entend souvent. La fragilité du duo dépasse l'abstraction des sons pour revenir à quelque chose de plus humain et de plus sensible. Il s'agit en gros d'un témoignage imparfait, mais c'est cette imperfection et cette fragilité qui rendent aussi ce témoignage intéressant, qui laisse parfois présager une collaboration qui pourrait très bien marcher.

Pour ce premier volume, la scène berlinoise n'offre rien de vraiment imprévu, mais propose tout de même deux pièces aventureuses et singulières qui valent le coup d'oreille.

[informations, présentations, interviews (olivier toulemonde/jamie drouin) & extraits: http://www.anothertimbre.com/inframince.html]

John Cage - Cartridge Music

JOHN CAGE - Cartridge Music (Another Timbre, 2013)
On comprend facilement la nécessité de composer une œuvre comme Cartridge Music en 1960, puisque cette composition de John Cage introduit le geste et le musicien (électronique) dans la performance à l'heure où cette dernière était cantonnée à des diffusions de pièces enregistrées sur bandes. Une partition comme Cartridge Music introduit justement la notion de performance dans la musique électronique, et signe le début de l'électronique en direct. Mais pourquoi continuer à jouer cette œuvre à l'heure où les performances électroniques sont omniprésentes? Ça peut paraître inutile d'un côté mais je ne crois pas, vraiment pas. Dans la mesure où il s'agit d'une partition graphique, une grande marge de manœuvre est accordée aux interprètes, et cette marge est justement exploitée ici, une marge qui laisse un espace de liberté aussi bien aux musiciens qu'aux avancées technologiques des outils utilisés (la tête de lecture d'une platine vinyle en l’occurrence).

Ces musiciens, qui sont-ils d'ailleurs? Justement quelques uns des plus originaux dans le domaine de la musique électronique improvisée, de la musique électroacoustique, et pour beaucoup assez proches des compositeurs du collectif Wandelweiser. Réunis par Stephen Cornford, des musiciens aussi talentueux que Ferran Fages, Alfredo Costa Monteiro, Patrick Farmer, Lee Patterson, Daniel Jones et Robert Curgenven proposent leur interprétation collective de l’œuvre de Cage. Des musiciens qui jouent habituellement des musiques plutôt différentes mais qui parviennent à une proposer une musique cohérente durant ces 37 minutes.

Les sept musiciens présents ont de toute façon en commun un intérêt pour l’exploration du son en tant que tel, l'exploration du timbre et des couleurs. Par courts blocs, ils proposent chacun leur tour, et à plusieurs, des fragments sonores différents mais unis par leur aspect matériel et temporel. Car l'écriture de Cartridge Music renvoie à une interprétation où des esquisses sonores se succèdent. Des fragments se succèdent, fragments différents mais qui se ressemblent dans leur approche du temps, un temps non-linéaire où toute narration est impossible, où tous les fragments sont contraints à s'insérer dans une temporalité éclatée. Mais c'est aussi la source sonore, la tête de lecture, qui unifie chaque fragment. Un aspect souvent abrasif et une approche frontale et physique du son sont constamment présents, chaque son est enregistré de manière très proche, et abordé de manière très matérielle et pragmatique.

Ceci pour l'aspect fidèle à la partition. Ce qui reste le plus intéressant ensuite, c'est la diversité des approches et la singularité des musiciens qui parviennent tout de même à faire surface malgré l'unité. Et c'est aussi cette diversité qui tient en haleine tout le temps que dure ce disque, ce qui n'est pas une mince affaire pour un enregistrement de 37 minutes avec comme seul outil une tête de lecture. Chaque musicien propose une gestuelle différente, une gestuelle qui s'oriente vers des blocs de sons puissants ou des micro-détails subtils et chirurgicaux. Une gestuelle qui tente l'impossible narration ou revendique l'aspect éphémère des blocs. On ne sait jamais trop ce qui va suivre, jusqu'à quand, si ça va revenir, s'arrêter, si c'est un accident ou si c'est volontaire, si ça répond à quelque chose et si ça se place volontairement en-dehors de ce qui a précédé.

Un disque extraordinaire en somme. Pour sa capacité à allier la rigueur d'interprétation et une proposition fidèle à John Cage, avec un esprit innovant et inventif. Innovant par rapport à la partition, et inventif par rapport aux pratiques électroniques actuelles. Hautement recommandé.

[informations, interview (stephen cornford) et présentation: http://www.anothertimbre.com/cartridgemusic.html]

Thollem McDonas - Dear Future

THOLLEM McDONAS - Dear Future (Wild Silence, 2013)
Ceci est ma première rencontre avec le compositeur Thollem McDonas, personnage éclectique proche de l'improvisation et des musiques expérimentales écrites, mais aussi, plus généralement musicien, compositeur, pianiste, professeur, électroacousticien, critique social, interprète de Scarlatti ou Debussy et chanteur dans un groupe post-punk. Un parcours étonnant, qui détonne, et qui fait rêver en somme. Si la première publication sur disque d'une œuvre de McDonas date de 2005, les enregistrements présents sur ce disque datent de ses premières années, aux environs de 1989-1990, lorsqu'il était encore un jeune universitaire. Je précise ceci car les pièces présentées ici ne sont pas forcément exceptionnelles, mais la fougue et la passion avec laquelle chacune de ces pièces est jouée laissent présager un futur prometteur.

Une collection impressionnante et extrêmement variée où on trouve pêle-mêle chanson engagée (assez proche de Phil Minton soit dit en passant, aussi bien au niveau du timbre de la voix que du jeu au piano), des interprétations ou des variations de Scriabine, Scarlatti, Bach, Prokofiev et Debussy, des expérimentations électroacoustiques, des improvisations libres, des compositions pour piano préparé, etc. Et le plus admirable, c'est que quelque soit le registre abordé, la personnalité de McDonas est toujours présente et égale à elle-même. Car quelque soit la pièce improvisée, interprétée, ou composée, McDonas la joue avec passion, de manière viscérale, avec toute la fougue d'un interprète romantique - que la pièce provienne du répertoire expérimental, punk, baroque, ou classique. Les répertoires se succèdent avec dérision parfois, mais surtout avec sérieux et révérence. Ce n'est pas un exercice de style, McDonas semble pleinement touché par la totalité de ces répertoires, qu'il les traite avec fidélité, avec passion, ou avec humour, ce sont des répertoires qui semblent toujours pleinement incorporés et intégrés à sa musique.

Hormis les deux dernières improvisations qui paraissent les plus abouties et les plus sérieuses, il ne faut pas chercher de "chefs-d’œuvre" dans cette rétrospective. Mais par contre, c'est un témoignage très touchant d'un compositeur en germe, en pleine maturation, avec ses imperfections touchantes, une passion juvénile parfois exacerbée, et un éclectisme idéaliste, qui annoncent un grand artiste. Très bonne initiative que cette publication.

[présentation (par terry riley, pauline oliveros et clifford allen!), informations & extrait: http://wildsilencelabel.bandcamp.com/album/dear-future]

Alessandro Bosetti - Stand Up Comedy

ALESSANDRO BOSETTI - Stand Up Comedy (Weird Ear, 2012)
(Quelques mots sur cette édition pour commencer. Le label Weird Ear ne se concentre que sur trois formats de diffusion, les vinyles, les cassettes et les téléchargements. Trois formats qui sont ainsi proposés pour ce nouvel album de Bosetti. Une proposition étrange qui déconnecte un peu trop le musicien et l’œuvre de sa reproduction et de sa diffusion, mais qui est une très bonne initiative pour l'auditeur/consommateur (et qui ne manquera pas de combler le fétichisme de l'objet). Le seul dommage, un peu incompréhensible, c'est que le CD ne soit pas également proposé, support pourtant le plus répandu et le plus accessible...).

Mais passons à ce Stand Up Comedy en lui-même, une des œuvres les plus réussies (avec Zwölfzungen) que j'ai entendu depuis que Bosetti a entrepris d'investir les rapports entre la musique et le langage. Sur la première face, de nombreux dialogues de différentes sources qui vont d'une interview de Bosetti sur son nouvel instrument (le Mask/Mirror) et son approche de la musique, un dialogue téléphonique où Bosetti interroge une femme américaine sur son grand-père, etc. Les dialogues sont simples, ce qui se dit pourrait être dit au comptoir d'un bar quelconque ("qu'est-ce que tu ferais avec un milliard d'euros?"), ou dans un wagon entre deux inconnus. C'est la façon dont ces discours sont traités qui est vraiment inusuelle. Chaque dialogue est soutenu par une musique électronique discrète, quelque fois par des enregistrements d'instruments. Mais surtout, avec le Mask/Mirror, Bosetti rompt les discours, les diffère, les décale, leur donne de l'emphase, les répète, les glorifie, s'en moque, les accentue. La langue devient une matière qui ne demande qu'à être dévoilée dans sa dimension musicale, que ce soit la langue connotée, ou les phonèmes, les accents, les intonations, les "espaces interstitiels" entre le sens propre et le sens figuré", etc. Et c'est tout un univers unique qui se dévoile durant cette première partie, une musique extirpée de force du langage. Elle s'extirpe notamment par l'appui et le renforcement sonore, mais également par l'interruption brusque, la répétition, et la polyphonie.

Sur la deuxième face, on entend la voix de Bosetti qui récite un dialogue auparavant enregistré, des sinusoïdes discrètes, et un duo instrumental avec Chris Heenan (clarinette contrebasse) et Johnny Chang (violon). Si les nappes électroniques sont discrètes, elles restent les seuls éléments ininterrompus et continus. Car à ses côtés, la voix et les instruments surgissent seulement pour des interventions brusques, des interventions qui apparaissent aussi vite qu'elles disparaissent, sans plus de raisons apparentes qu'à l'intérieur d'un soliloque récité par un psychotique. Une pièce pour voix, électronique et instruments où chaque élément est distinct, mais où tous se retrouvent pour se soutenir et s'appuyer. Une pièce pleine de tension, assez violente et originale. Très réussie.

En somme, une des plus belles investigations de Bosetti sur le rapport et les interférences entre la musique et la langue. A écouter.

[informations, présentation, extrait: http://weirdear.com/alessandro-bosetti-stand-up-comedy/]

Ferran Fages & Lali Barrière - Novosibirsk

FERRAN FAGES & LALI BARRIERE - Novosibirsk (Con-V, 2011)
Sur le site du netlabel con-v, ce court album digital de 25 minutes est qualifié de fragile, instable et imprévisible pour certains de ses aspects (textures, structure). Et effectivement, avec un assemblage d'objets, de micro-contacts, et d'installations électroacoustiques, le duo espagnol Ferran Fages/Lali Barrière produit une musique inattendue et fragile. Une musique de bricolage, au sens où l'entendait Genette (qu'il différenciait bien de l’ingénierie).

Fages et Barrière collectent des objets et du matériel sonore qui ne sont pas destinés à cette utilisation, qui ne sont parfois même pas destinés à une quelconque utilisation sonore ou musicale. C'est en ce sens qu'ils sont plus bricoleurs qu'ingénieurs ici. Les deux artistes sonores ne se confondent que rarement ici, on reconnaît assez facilement le goût de Fages pour les silences, les textures granuleuses, les interférences électriques et magnétiques, ainsi que le goût de Barrière pour l'utilisation d'objets non-musicaux, de métaux, plastiques et d'objets domestiques qui lui tombent sous la main. C'est à chacun de se démerder avec ce qu'il a dirait-on. Et ils s'en sortent plutôt bien. Ils s'en sortent en établissant un dialogue bruitiste où l'électricité répond aux objets acoustiques, où l'amplification parle d'elle-même et est utilisée en tant qu'élément musical plus que sonore. Un dialogue où les deux parties évoluent sur deux plans différents, mais au sein d'un même espace, il y a bien une interaction intime entre les deux musiciens. Chaque évènement appelle une réponse que chacun s'empresse d'apporter. Alors, même si l'ambiance est plutôt calme et aérée durant ces 25 minutes, il n'empêche que c'est une musique assez réactive et spontanée, qui, de plus, sort largement des canons de l'improvisation libre électroacoustique et de la noise.

Une musique fragile oui, constituée de nombreuses ruptures dans sa structure, constituée aussi de textures bricolées qui peuvent parfois être aussi imprévisibles qu'aléatoires. Fages et Barrière évoluent dans différents univers qui semblent n'être dictés que par le déroulement du temps, seule la durée semble construire la pièce en différentes parties. Une durée qui appelle mouvement et réponse, une durée à laquelle le duo Fages/Barrière répond avec talent et singularité.

[présentation, informations & téléchargement (gratuit): http://www.con-v.org/cnv71.html]

Kevin Drumm - Crowded

KEVIN DRUMM - Crowded (Bocian, 2012)
C'est sur le label polonais Bocian qu'est paru ce vinyle de Kevin Drumm, un excellent label soit dit en passant, consacré aux nouvelles formes de noise, et plus particulièrement à KD. Et sur Crowded, on a effectivement affaire à de la noise qui n'a rien de conventionnelle, à une musique qui s'écarte de tous les canons esthétiques et de toutes les normes, en s'en servant tout de même par endroits.

Je pense surtout à cette première face aussi déroutante que magnifique. Une face qu'on ne saurait qualifier - j'aurais quand même envie de dire qu'il pourrait s'agir d'ambient maximaliste. Durant un quart d'heure, KD superpose de nombreuses boucles qui se répètent. Mais chacune des boucles ne se répète pas à l'identique, d'infimes variations ont lieu de manière autonome (variations de hauteur, de durée, de réverbération etc.). Et à l'intérieur de ce continuum aux sonorités étranges, sonorités boisées, liquides, mais aussi électriques et numériques, des éléments apparaissent en surimpression du continuum à la mécanique déréglée. Une musique calme et inquiétante, qui offre continuellement un reflet altéré d'elle-même. Une succession de doubles jamais identiques. Si la texture de ce continuum a quelque chose de calme et d'aérien, la forme s'apparente quant à elle aux éléments liquides et surtout au flux héraclitéen.

Et si la première face paraît composée d'éléments naturels et mécaniques qui évoquent parfois des oiseaux, un moulin à eau ou des grenouilles, la seconde face n'évoque plus que l'artificialité (à travers la guitare et ses nombreux effets) et l'aléatoire (à travers l'arbitraire de la forme). Une face beaucoup plus noise qui s'ouvre avec un solo de guitare où pédales de distorsion et de saturation se disputent les larsens. Un solo enregistré de loin qui est vite submergé par un bloc de larsen fait de contrastes sans nuances. Tout le reste de la face sera dès lors une succession de ces blocs sonores qui démarrent et s’interrompent sans crier garde. Des blocs imposants fondamentalement constitués d'une basse massive et de suraigus saturés qui évoluent de manière strictement parallèle au gré des micro-mouvements entre la guitare et l'ampli. Un morceau qui paraît plus aléatoire - arbitraire en tout cas, et moins recherché que le précédent, mais dont l'aspect spontané et massif lui confère autant de puissance.

Deux pièces qui n'ont pas grand chose à voir mais qui se complètent et se succèdent très bien. Double réussite.

Jason Lescalleet - How to not do it

JASON LESCALLEET - How to not do it (Chondritic Sound, 2012)
How do not do it est une cassette éditée par le label Chrondritic Sound, format qui correspond très bien au travail de Jason Lescalleet, fondamentalement basée sur la manipulation des bandes, tout comme ses collègues Graham Lambkin ou Aaron Dilloway.

Sur la première face, des plages sonores inattendues, extraits de musique et de sons enregistrés manipulés à l'extrême. Lescalleet est toujours fascinant parce qu'il semble traiter le son à la manière d'un cinéaste ou d'un peintre impressionniste. Lescalleet se focalise sur des boucles, les répète, puis les ralentit, les sature, les manipule à l'aide d'aimants, etc. Des grains inouïs surgissent et sont dévoilés au travers des manipulations et de la répétition de ces bandes. Une musique comme on n'en avait jamais entendu, à partir de matériaux déjà connus (variétés musicales, field-recordings), qui semble être une forme dérivée et humoristique de musique concrète, avec un grand fonds noise et drone. Mais sur cette face, une autre surprise attend l'auditeur. C'est l'intégration de la parole. Des voix se font constamment entendre, des voix non-musicales manipulées pour s'intégrer à l'univers de JL. Prières pénitentes en espagnol et monologues injurieux de mécontentement s'insèrent et s'ajoutent aux sources sonores - parfois musicales, parfois concrètes - pour former une architecture sonore riche de nombreux plans. Plans musicaux (samples), concrets (field-recordings), abstraits (drone), et discursifs s'enchevêtrent pour former une musique où les repères se dissolvent dans le temps. Une dissolution qui permet alors la révélation ou le dévoilement de plans sonores inattendus, textures et grains cachés mais inhérents aux sources utilisées.

Sur la seconde face, JL n'utilise presque plus que du matériel d'origine musicale. De la musique savante à de la pop (Blinded by the light de Manfred Mann). De la même manière, en créant un nouveau contexte musical, JL anéantit les codes et le sens propres à ces morceaux pour en faire une œuvre personnelle et originale, une œuvre qui jette une lumière nouvelle (et drôle) sur la matière sonore manipulée, et en révèle des textures, des propriétés sonores, des ambiances qu'on aurait jamais pu soupçonner avant l'intervention et le travail de ce génie de la manipulation de la perception.

Evan Parker - Vaincu. Va!

EVAN PARKER - Vaincu. Va! (Western Front, 2013)
L’organisation canadienne Western Front marque son quarantième anniversaire par l'édition d'une de ses nombreuses archives. Et elle n'a pas choisi la moindre, puisqu'il s'agit d'une édition vinyle d'un concert solo d'Evan Parker enregistré sur bandes en 1978, à Vancouver.

Tout commence avec des attaques brusques suivies de glissando - comme si Evan Parker testait l'acoustique de la salle de concert, testait l'interaction entre l'espace et son saxophone soprano. Il ne lui faudra pas plus de quelques secondes pour apprivoiser le lieu. Très vite, le saxophoniste britannique se lance dans une longue improvisation monolithique et linéaire, basée sur la respiration continue et les possibilités polyphoniques du soprano. Durant ce live, très dense et intense comme souvent chez EP, ce dernier prend tout de même le temps de s'arrêter quelquefois sur des boucles mélodiques, des mélodies polyphoniques comme nous en resservira Colin Stetson, mais quelques trente ans plus tard...

Ces bribes de mélodies, ces cycles hallucinés, blocs envoûtants qui surgissent parfois du long flux d'EP avant de s'y engouffrer sans même qu'on ait eu le temps de s'en rendre compte; ces mélodies donc, si elles conservent la même intensité que le reste de l'improvisation et le même caractère non-idiomatique, permettent d'aérer et d'apaiser cet enregistrement, du reste très nerveux, agressif et tendu. Car durant cette grosse demi-heure, les respirations sont rares, et quand il y en a, c'est que les idées, trop rapides et nombreuses, ne peuvent plus se percevoir qu'avec l'aide du silence et de la respiration, sans quoi on tomberait dans une fusion d'idées chaotiques.

Mais ces silences et ces esquisses mélodiques ne sont pas le plus important à mon goût même si ils facilitent l'écoute et font de ce disque une très bonne introduction au travail en solo d'EP. Ce qui m'impressionne beaucoup chez ce dernier - comme chez la plupart des musiciens que j'admire le plus, de Coltrane à Bismillah Khan, en passant par Keith Rowe et Michael Pisaro - c'est cette faculté de toujours faire la même chose en se renouvelant constamment. Durant ce livre (mais ceci s'applique aussi à l'ensemble de ses enregistrements), EP se propulse le long d'une trajectoire unifiée, riche et dense, il s'y propulse corps et âme en conservant toujours la même intensité. Une intensité maintenue très haut, jamais rompue, et qui permet de relier tous les évènements qui se déroulent durant ce concert.

Avec ses innombrables et subtiles techniques étendues (qui passent aussi bien par la respiration continue, que par des variations des doigtés, du flux respiratoire, de la position de la langue, des lèvres, etc.), EP a bouleversé l'histoire du saxophone et des instruments monophoniques. En solo, exercice périlleux auquel il s'est souvent adonné avec plaisir, sa virtuosité n'en ressort que mieux. Mais aussi et surtout son énergie et sa corporalité (mises ici en avant par une prise de son très rapprochée), bref son individualité. Les enregistrements d'EP sont déjà nombreux aujourd'hui (y compris ses solos), et un de plus peut ne pas forcément paraître nécessaire. Pourtant ce témoignage supplémentaire me paraît encore une fois essentiel, notamment du fait qu'EP atteignait à cette période son plus haut degré de virtuosité tout en continuant de rechercher une voix et de l'explorer à travers ces longs cris hallucinants. Recherche, maturité, sagesse et fougue étaient au rendez-vous : hautement recommandé!

[présentation, informations, extrait: http://front.bc.ca/events/evan-parker-concert-and-lp-launch/]
(disponible en france et en europe chez metamkine)

HATI & Z'EV - Collusion

HATI & Z'EV - Collusion (Idiosyncratics, 2013)
HATI (un jeune  duo polonais de percussionnistes formé de Rafał Iwański et Rafał Kołacki) et le batteur kabbaliste Z'EV signent leur troisième rencontre sur disque avec Collusion. Chacun des musiciens présents semble intéressé par les phénomènes de transe, d'hypnose, de possession, mais aussi par le mysticisme, la contemplation, et le fétichisme rituel du son. Avec ce bagage, les trois musiciens prennent leurs instruments (très majoritairement percussifs, hormis un pipeau) en main et nous proposent un voyage "transcendantal" via la richesse des spectres harmoniques. 

Du gong aux cymbales en passant par des toms basses et des crotales, tous les instruments sont globalement dotés d'une grande richesse harmonique. Sur une pulsation et des à l'intérieur de cycles réguliers, HATI et Z'EV déploient toute la richesse de ces spectres, les superposent en une sorte de nuage sonore aux allures atemporelles et magiques. Ce n'est pas chaotique: les couches se superposent en se laissant de la place, chacun respecte une pulsation établie et des cycles rituels, ni virtuose: les trois musiciens jouent beaucoup sur la répétition à une pulsation moyenne-rapide. Je ne sais pas dans quelle mesure cette musique est écrite ou improvisée (est-elle le fruit des recherches de Z'EV sur la kabbale?), comme dans les musiques rituelles, dans les musiques de transe de possession notamment, la structure semble tout de même établie selon des codes tacites immémoriaux, et c'est à chacun de jouer à l'intérieur de ces codes et de cette structure. Musique liturgique dédiée à elle-même, à moins que ce ne soit de la musique animiste, une ode à l'univers et au son. En tout cas, la musique de Z'EV et Hati semble réflexive au sens où elle semble avant tout dédiée à elle-même.

Un voyage percussif au pays des spectres et des harmoniques, des pulsations hypnotiques et de la contemplation sonore. Conseillé.

netlabels [jamie drouin/lance austin olsen, zveep]

Je n'ai pas vraiment l'habitude de m'attarder sur les publications digitales et sur l'activité des netlabels en général (fétichisme de l'objet oblige...). Mais quelques publications récentes et gratuites (sans aucun rapport l'une avec l'autre) méritent quand même l'attention.

JAMIE DROUIN & LANCE AUSTIN OLSEN - A Drawn Horizon (Infrequency Editions, 2013)
Avec A drawn horizon, le duo canadien Jamie Drouin (synthétiseur analogique) & Lance Austin Olsen (électronique) propose un univers riche, ambivalent, et original. Un synthétiseur analogique et de l'électronique pour une musique qui oscille entre les influences du drone et du minimalisme par ses aspects statiques, mais qui lorgne aussi vers le réductionnisme pour son approche exploratrice et calme. Les deux parties de cette publication sont constituées de deux strates : un synthétiseur effacé et lointain qui produit des fréquences simples, discrètes, répétitives et hypnotiques, quand elles ne sont pas statiques. Et par dessus, des objets amplifiés, enregistrés de manière très proche cette fois (par opposition aux nappes lointaines du synthé), même si les deux strates sont à peu près au même niveau. La distance et la proximité semblent s'opposer mais s'unifient dans une volonté commune d'explorer la physicalité des signaux sonores, que ce soit un larsen ou l'amplification de métaux frottés.

Deux parties calmes et lentes, qui n'évoluent que très sensiblement, mais qui prennent le temps nécessaire à la perception complète de chaque blocs sonores qui structurent ces pièces. Drouin & Olsen adoptent des formes claires et simples qui permettent un compromis intéressant entre l'improvisation et la composition électroacoustique. Mais qui permettent surtout une perception très sensible et contemplative de chaque phénomène sonore représenté. Très bon travail.

http://www.infrequency.org/IN019.html

zVeep - Live at Kobe (suRRism-Phonoethics, 2013)
J'ai déjà chroniqué plusieurs disques de zVeep ici même, un jeune trio composé des membres fondateurs du collectif XoNdZf. Et comme je l'ai déjà signalé, il ne s'agit pas d'une musique foncièrement originale. vee Reduron (guitare), dom Dubois Taine (synthétiseur analogique, électronique) et tiri Carreras (batterie) font de l'improvisation libre qui lorgne sur le free rock et le free noise. De l'improvisation intense, puissante et saturée comme j'en ai déjà entendu pas mal. Ceci-dit, zVeep fait partie de ces groupes que je recommanderais volontiers à quiconque souhaite découvrir ces musiques. Pour leur virtuosité et leur puissance certes, mais surtout pour leur énergie qui semble inépuisable, ainsi que pour la joie qu'ils semblent investir dans chacune de leur représentation.

Bonheur de jouer, de dialoguer et d'improviser entre eux, de perpétuer une "tradition" (l'eai et l'efi), de chercher à se renouveler et de renouveler cette dernière, et surtout de partager. zVeep s'investit dans sa musique de manière viscérale, avec passion, pour une musique fraîche, puissante et décomplexée. Interactions serrées et organiques pour quatre improvisations toujours délurées.

http://surrism.phonoethics.com/release/zveep-live-at-kobe/

Chris Abrahams - Memory Night

CHRIS ABRAHAMS - Memory Night (Room40, 2013)
Avec ces quatre compositions électroacoustiques, Chris Abrahams s'écarte radicalement des explorations soniques du synthétiseur DX-7, comme des séquences hypnotiques utilisées au piano dans The Necks. Principalement composées sur ordinateur et à l'électronique, ces quatre pièces usent également volontiers du piano. Un piano préparé où les cordes sont frottées comme sur la première pièce, quand ce n'est pas une improvisation modale sur un fond sonore aux allures dub. Un mélange subtil et raffiné où instruments et boucles numériques se côtoient avec délicatesse et subtilité.

Memory Night n'a rien de l'improvisation expérimentale, qu'elle soit libre, non-idiomatique ou électroacoustique. Toutes les pièces sont clairement structurées et les idiomes sont utilisés avec abondance. Que ce soit un solo de piano modal, des scratch hip-hop, des boucles dub, des nappes proches de l'ambient et de l'abstract hip-hop, Chris Abrahams navigue sur des eaux connues oui, mais avec un navire très personnel. Il y a toujours des repères auxquels s'accrocher, des codes musicaux connus, mais le pianiste et compositeur les arrange d'une manière personnelle, au sein d'une ambiance plutôt sombre et intimiste. Carnets de bords d'un voyage nocturne au sein des goûts de ce musicien australien qui n'a pas fini de me surprendre.

Quatre compositions personnelles et singulières qui s'écoutent avec une certaine facilité, une facilité parfois déconcertante même. Chris Abrahams propose une sorte de musique qui pourrait ressembler à de l'idm lente, ou à du dub improvisé, ou encore à de l'eai mélodique et pulsé, à moins que ce ne soit rien de tout ça, juste une œuvre personnelle et singulière, intime et originale. En tout cas, même si l'aspect accrocheur et la propreté impersonnelle des nappes synthétiques me rebutent par moments, je reste admiratif devant la finesse avec laquelle séquences numériques et jeux instrumentaux s'équilibrent et se côtoient sans opposition, avec quel raffinement ils se mélangent sans s'imiter. Mais aussi devant la singularité de ces univers sonores improbables et inattendus.


utilisation instrumentale d'objets non-musicaux [adam asnan, olaf hochherz, gregory büttner, osvaldo coluccino]



Autant inspirées de la musique concrète, que des field-recordings, de l’art et des installations sonores, de la musique lo-fi ou de l’improvisation dite réductionniste, de nouvelles pratiques apparaissent chaque jour autour des objets. Objets fétiches, objets quotidiens, objets domestiques, objets traités par l’électronique, objets acoustiques. Si le répertoire instrumental et électroacoustique paraît s’essouffler, les pratiques musicales ne sont pas en reste, tout un univers sonore est encore à explorer avec ces nouvelles pratiques : je pense inévitablement à Ryu Hankil et sa machine à écrire, Atsuhiro Ito et ses néons, Gill Arnò (alias mpld) et ses rétroprojecteurs, Osvaldo Coluccino et Lali Barrière pour leurs objets quotidiens, etc.

ADAM ASNAN – FBFC (1000füssler, 2013)

Sur le label allemand 1000füssler dirigé par le musicien Gregory Büttner, une série de trois mini-Cd consacrée à ces pratiques vient justement de paraître. FBFC, par exemple, est une composition d’Adam Asnan centrée sur l’amplification du couvercle d’une pellicule 35mm – travail qui n’est pas forcément sans rappeler celui de mpld. Je n’avais encore jamais entendu ce musicien, mais un artiste prometteur s’annonce avec cette suite. Des battements réguliers semblables à des hélices d’hélicoptère, quelques larsens, des couleurs métalliques et industrielles, ainsi qu’une approche percussive ressortent clairement de l’ensemble de ces quatre pièces. Si aucun élément instrumental n’est mis en jeu ici, on croirait souvent entendre la peau d’une grosse caisse, et les formes utilisées sont souvent linéaires comme dans beaucoup de pièces réductionnistes. Adam Asnan, musicien issu de la musique concrète, exploite son couvercle comme un instrument, et explore ce matériau de manière plus musicale que bruitiste. Il s’agit de composer avec ce matériau issu du cinéma, pour en faire non un « cinéma pour l’oreille » mais bien une pièce musicale, qui s’apparente plus à de la musique instrumentale qu’autre chose. Très bon travail, j’attends d’en écouter d’autre avec impatience. 


OLAF HOCHHERZ – Rooms to carry books through (1000füssler, 2013)
Dans une veine similaire, Olaf Hochherz tente lui aussi de créer de la musique à partir d’une source sonore extérieure au domaine musical. Rooms to carry books through est une pièce de vingt minutes fondée sur une source sonore plus qu’incongrue, un livre, objet silencieux par excellence... C’est aguichant, étonnant et surprenant dans l’idée peut-être, mais à vrai dire, je ne suis pas sûr qu’une absence de sources sonores aurait changé grand-chose à cette pièce. Le livre est relié à tout un système de dix enceintes et de microphones piézoélectriques qui génèrent un larsen modifié par la pression exercé sur le livre. Il s’agit donc bien plus ici d’une exploration des champs piézoélectriques que des propriétés sonores d’un livre. En résulte une pièce très électrique et abrasive, improvisation granuleuse aux sonorités primitives et lo-fi. Ça grince, ça couine, ça pète, musique défectueuse et parasitaire, improvisation basée sur le bricolage et le bruit. Pas exceptionnel, mais j’aime plutôt bien ce côté simple et archaïque, ainsi que l’énergie avec laquelle l’instrument est utilisé.


GREGORY BÜTTNER – Scherenschnitt (1000füssler, 2013)


Le dernier disque de cette série est une pièce intitulée Scherenschnitt, extraite d’une installation sonore éponyme de Gregory Büttner. Une pièce très courte (dix minutes) basée en partie sur des objets (papiers, cartons, ciseaux et cutter) mais surtout sur une action (le découpage). Gregory Büttner a placé ses micros très très près des objets pour pénétrer au mieux le phénomène sonore. Une exploration sonore profonde du découpage, assez proche de la musique concrète. Car hormis quelques effets de delay, de réverbération, et d’amplification après la performance, le son est projeté tel quel. On reconnaît très bien les actions. Des découpages qui arrivent par assauts et par vagues. On peut percevoir la volonté de recherche assez minutieuse à travers le renouvellement constant des couleurs, Büttner ne lésine pas sur l’exploration et développe perpétuellement de nouveaux timbres avec de nouveaux matériaux toujours très proches. La construction est simple, une succession de vignettes sonores, mais du fait de la courte durée aussi, ce renouvellement perpétuel attise la curiosité et maintient l’attention. On a envie de connaître toutes les possibilités sonores de ce matériel et de cette action. Et on n’est vraiment pas déçu face à ce que propose Büttner au cours de ces dix minutes – format idéal pour un champ d’investigation si réduit. Conseillé.


OSVALDO COLUCCINO – Oltreorme (Another Timbre, 2013)


Je finis cet article sur les objets sonores avec Oltreorme, une suite de quatre pièces pour objets acoustiques d’un musicien italien qui avait déjà sorti un disque sur ce principe l’année dernière : Osvaldo Coluccino. Durant cinq mois, cet artiste a enregistré et composé quatre pièces acoustiques à partir d’objets frottés, frappés, caressés, percutés, etc. Aucun instrument n’est utilisé, mais l’approche de Coluccino est plutôt instrumentale, les sonorités tendent à se rapprocher des percussions le plus souvent, voire des cuivres sur la dernière partie. Sur les notes du disque, Osvaldo Coluccino recommande d’écouter ce disque à volume normal, voire bas, dans un environnement le plus silencieux possible. Effectivement, les sons ont tendance à être imperceptibles, ils passent comme des ombres fugitives qu’on peine souvent à percevoir. L’univers d’Oltreorme est instable, fantomatique et au-delà du réel. Même si ce sont des objets usuels et quotidiens qui sont utilisés tout du long, et de manière brute en plus, on n’arrive pas à se les représenter, pas plus qu’on ne parvient à se figurer la forme dans laquelle ils s’inscrivent. Une musique très ténue en somme, qui se fond dans l’environnement tout en s’en détachant, on ne sait plus si les sons proviennent des enceintes ou de l’environnement, la distinction est souvent imperceptible et le disque parvient même à se faire oublier par moments. Tout est affaire d’écoute, d’attention et de perception. Une expérience vraiment originale basée sur des textures uniques. Dans mon souvenir, je trouvais déjà le précédent disque de Coluccino assez inaccessible à cause de ces timbres trop abstraits et rudes, mais en fait, plus que difficile, Oltreorme est déroutant. A cause notamment de cette distinction qui s’efface entre l’univers musical abstrait et l’univers environnant concret. En plus de donner une vie musicale à des objets non-musicaux, Coluccino efface – de manière musicale - la distinction entre la projection sonore et son environnement, pratique radicale inspirée de la philosophie de Cage. Je ne suis pas sûr « d’aimer » ce disque, mais rien que pour l’aspect très déroutant et perturbant de l’expérience, je le conseille.

Informations, présentations, extraits, chroniques, interview

OLAF HOCHHERZ – Rooms to carry books through: http://www.1000fussler.com/seiten/reviews/reviews_olaf_hochherz.html
OSVALDO COLUCCINO – Oltreorme: http://anothertimbre.com/oltreorme.html