DONEDA/KOCHER - le belvédère du rayon vert (Flexion, 2013) |
Car le duo s'efface de plus en plus, et avec le belvédère du rayon vert, c'est maintenant au lieu d'enregistrement d'avoir la première place : un hôtel quasiment abandonné dans le sud de la France (qui a donné son nom au disque), à la frontière espagnole et sur les bords de la Méditerranée, proche d'une ligne de chemin de fer dans une petite commune nommée Cerbère (Pyrénées Orientales). Les interventions de Doneda & Kocher sont donc plutôt discrètes et calmes durant cette petite heure divisée en cinq pièces. Des souffles légers et proches d'un bruit blanc au soprano, des notes traditionnelles dans des registres extrêmes à l'accordéon, et beaucoup de silence. La simplicité des interventions instrumentales ainsi que les silences permettent au lieu de s'exprimer de plusieurs manières. Les résonances instrumentales permettent d'un côté de matérialiser l'aspect architectural et acoustique de ce lieu aux multiples facettes. D'un autre côté, ce sont les silences qui permettent à l'atmosphère de l'hôtel et de son environnement proche de s'exprimer.
Les modes de jeu de Doneda et Kocher varient peu selon les pièces, et pourtant, ce qui étonne le plus, c'est la diversité des ambiances propres à chaque pièce. J'imagine que les musiciens changent d'emplacement, qu'ils ont enregistré dans le hall, puis dans une chambre, et dans divers espaces de l'hôtel, et quand on écoute ces enregistrements, le caractère propre à chaque espace, et aux différents moments de la journée, ressort en premier lieu, avant même l'aspect instrumental.
Deux grands musiciens qui s'effacent derrière un lieu à moitié désaffecté. Je trouve ça très beau. Le lieu acquiert une nouvelle vie, très riche en propriétés acoustiques, en atmosphères, en ambiances. Doneda & Kocher ont su trouver une sorte d'équilibre maximal, fait d'un recul et d'un effacement instrumental, afin de laisser les atmosphères et les caractères de ce belvédère se développer avec une présence étonnante. Très bon travail.