THE ELECTRICS - Fylkingen (ILK, 2013) |
De manière générale, j'aime beaucoup les propositions musicales radicales et extrêmes. Ainsi, la musique de Derek Bailey me paraît toujours remarquable, mais la voie qu'il a ouverte dans les musiques improvisées me paraît aujourd'hui plus stérile que celle ouverte par Coltrane et le free jazz ensuite. A tout renier, on finit par s'enfermer dans des codes impersonnels. Et à la limite, quand on est attaché à certaines traditions, on peut faire quelque chose de beaucoup plus personnel et intéressant en les intégrant complètement à sa musique. Comme The Electrics donc, qui propose du free jazz, à l'ancienne, du free littéralement bercé par le jazz (comme en témoigne le titre le plus long de ce LP : All the things we are).
Du free traditionnel ? oui et non. The Electrics intègre aussi des éléments beaucoup plus contemporains, telles les techniques étendues très harsh de Dörner. The Electrics joue sur l'énergie, mais sait aussi se reposer aux moments les plus judicieux. En tout cas, le mélange d'improvisation spontanée et bruitiste avec des lignes de basse et des rythmiques ternaires très swing, de même que la succession de certains solistes plus jazz (Williamson et Ericson) avec des improvisateurs plus radicaux et plus axés sur le son que sur le rythme et les phrasés (Dörner surtout), le mélange en somme d'improvisation libre et collective, de solo jazzy et swing, de musique modale et de free jazz, tout ça est manié avec un équilibre assuré et un grand sens de la musicalité.
The Electrics utilise des éléments connus et parfois même traditionnels pour créer une musique somme toute originale, une musique personnelle, innovante, puissante, créative, et surtout jouissive. Les deux pièces présentées ici varient constamment en couleur, en dynamique, en esthétique, sans que l'on s'en rende compte ; et le tout est joué avec la même passion et la même énergie. Une musique puissante, dansante, et recherchée, jouée avec talent et virtuosité bien sûr.